UN CONCPET A REDÉCOUVRIR.

L’idée et le mot de viticulture intégrée ont surgi lors de la découverte du CTA 1 ; ce Centre Technique de coopération Agricole et rurale, promeut des valeurs qui m’ont fortement interpelé.

Depuis la production jusqu’au commerce – et là se trouve me semble-t-il son originalité – le CTA « agit pour améliorer la sécurité alimentaire, accroître la prospérité et favoriser une gestion optimale des ressources naturelles ».

La viticulture intégrée serait donc globale, permettant mais aussi contraignant le producteur responsable à une approche entrepreneuriale qui ne remettent pas en question mais au contraire mettent en avant ses valeurs. Au centre de sa pensée comme de ses choix, elles seraient sublimées, osons le mot, rentabilisées grâce aux méthodologies et techniques d’aujourd’hui.

Evolutive et réflexive, cette viticulture donnerait assez de la souplesse pour s’adapter sans perdre de vue le temps long de l’agriculture.

La valeur « chapeau » serait l’humain, l’humain viticulteur et l’humain salarié, pour l’intérieur de l’entreprise productive, l’humain client et l’humain consommateur, pour l’aspect aval, l’humain utilisateur enfin, pour l’impact de l’activité sur l’environnement de tous.

La viticulture intégrée peut se percevoir comme une évidence, une porte ouverte enfoncée ; je dirais plutôt que, sans être révolutionnaire, elle assemblerait en une direction – une stratégie claire, formalisée, appliquée et suivie, les domaines épars de la recherche et de la pratique individuelles.

La viticulture intégrée intègre la nécessite d’un changement de paradigme c’est-à-dire des « conceptions théoriques dominantes ayant cours » dans la filière et qui fondent tous « les types d’explications envisageables ».

Deux exemples.

Essayons d’illustrer cette inversion du point de vue, à la fois simple et révolutionnaire, facile à comprendre et si complexe à mettre en œuvre : mettre la technologie au service du terroir et partir du consommateur.

La viticulture est un des secteurs économiques qui a le plus innové et investit dans son appareil productif depuis 50 ans ; ce « gap » technologique a permis de donner des moyens qualitatifs jamais atteints aux exploitants et metteurs en marché. Mais dans quel but ?

L’objet de tels progrès pouvait se fonder dans une démarche pérenne de valorisation du patrimoine foncier du vigneron : le terroir (mot apparemment n’existe qu’en français) peut se définir comme un sol – un espace- aux caractéristiques (géologiques, climatiques, d’exposition, …) spécifiques révélées par le travail humain ; cette interaction donne naissance à une culture propre géographiquement identifié. Lui donner un prix et le préserver dans le temps long peuvent s’inscrire comme but premier de l’agriculteur.

La technologie peut et doit se soumettre à ce temps long, sinon elle se transforme d’outil en finalité ; elle n’offre que ses risques : uniformisation et industrialisation, épuisement de la ressource, perte d’identité… Surtout, elle peut faire croire à une recette miracle, sorte de marketing de l’offre qui voudrait qu’il suffise de bien produire pour vendre ou qui fantasmerait sur ce vin que le consommateur attend.

Car sait-on réellement ce que veut le consommateur ?

Ce personnage clé du marché, dont on parle beaucoup, peu d’acteur en tienne compte ; partir de sa vision des choses implique beaucoup de remise en question.

Ainsi si l’on parle du prix, faut-il se débarrasser des notions de coûts de revient, de tarif, de facturation, de cours de vrac … pour partir du PVC prix de vente consommateur et donc pour définir le positionnement du vin. Garantir au consommateur quelque soit le circuit, le pays, la cohérence de ce prix, sa stabilité, le lui expliquer comme lui proposer un moment de consommation clair, puis trouver à partir du PVC la rentabilité de l’entreprise, voilà l’enjeu.

Toute réflexion, toute décision doit tenir compte en premier du consommateur, s’évaluer à son aune.

Comme beaucoup d’institutions, la filière viticole traverse une crise de gouvernance : héritées des années 1970, ses structures semblent souvent en décalage face aux problématiques posées. Toujours efficaces sur bien des plans, elles sont pour la plupart d’entre elles, bien en peine de produire et surtout de mettre en œuvre une stratégie suivie et efficace.

Au niveau politique, leur influence, leur « lobbying » restent primordiaux ; elles arrivent ainsi à peser sur les décisions et à porter une voix entendue en Europe. Sans contexte, elles sont un outil qui charpente la vie viticole et à ce titre, démontrent leur caractère incontournable.

Mais, elles se sont – comme tous les corps intermédiaires français – déconnectés de leur base, c’est-à-dire du monde entrepreneurial viticole. La préoccupation majeure des vignerons est de vivre de son travail, de pérenniser son outil et son patrimoine pour pouvoir le transmettre, de se sentir libre d’investir.

Or sur ces trois sujets, le chef d’entreprise viticole se sent bien seul depuis trop longtemps : certes, il reste sous un incroyable robinet de subventions matérielles et dans un cadre de contraintes qui malgré son poids administratif de plus en plus pesant, le soutien et le légitime. Pourtant, il aspire à mieux. Il aimerait qu’on lui montre une direction, un but commun fait de valeurs et d’objectifs ; il voudrait se voir offrir les moyens de son indépendance et la reconnaissance de ce qu’il représente : un acteur économique de première importance, apportant des excédents au commerce extérieur indélocalisables, un soft power culturel mondialement apprécié et reproduit, un aménagement du territoire ouvrant des perspectives touristiques comme écologiques.

Il a donc besoin de représentativité directe, de non cumul des mandats, de fluidité institutionnelle et de soutien opérationnel ; que les milliards d’€ d’aides lui permettent de bien vendre pour s’autonomiser et construire son propre modèle économique.

Aller plus loin, la HVC.

Dans cette approche d’une viticulture intégrée, décomplexée en somme, l’axe d’avenir me paraît être une valorisation générée par l’aval, par la maîtrise de la vente : la marge générée par un chiffre d’affaire, le nombre de bouteilles ou équivalents vendus qui doit couvrir le potentiel de production, est à l’avenir et sur un temps long, le facteur de la création de richesse dans une entreprise viticole.

Elle garantit aussi l’indépendance économique du vigneron, ses revenus, et sa capacité à investir et transmettre : longtemps on a donné à croire que la qualité du produit seule permettait d’assurer la réussite ; cette indispensable progression du contenu a atteint un seuil difficilement dépassable. La qualité est même devenue un minimum pour pénétrer un marché.

Ainsi, en complément des multiples labels qui normalisent la production, pourrait-on voir se mettre en place, une reconnaissance de la qualité de la commercialisation. Plutôt que de se gargariser de vastes projets creux (l’agro-écologie ?!), cette libération de l’énergie, ce volontarisme positif pourrait servir d’utopie concrète pour mobiliser les acteurs des filières.

Les critères posés sont simples :
-mise en bouteille à la propriété et origine garantie,
-commercialisation en direct,
-ouverture minimale sur l’export,
-mise en place d’outils vente / marketing (bilan commercial dynamique, gamme argumentée, positionnement prix et budget trade marketing),
-garantie logistique aux professionnels (0 rupture, 0 stocks),
-suivi permanent des clients,
-discours, méthodes et actions qui partent et se mettent au service du consommateur,
-anticipation sur 12 mois minimum de l’activité.

Une sorte de commerce équitable donnant aux distributeurs la possibilité de communiquer sur leur participation au revenu décent du producteur, peut même couronner cette HVC.

Ce chantier, car il ne s’agit là que de quelques idées jetées en pâture à la réflexion, ne vous donne-t-il pas envie de suggérer vos pistes, de critiquer et de participer ?

1 « Le  (CTA) est une institution internationale basée aux Pays Bas et en Belgique, créée en 1983 conjointement par les Etats du Groupe ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) et de l’Union européenne (UE).

Le CTA agit pour améliorer la sécurité alimentaire, accroître la prospérité et favoriser une gestion optimale des ressources naturelles dans les pays ACP. Il facilite l’accès à l’information et aux connaissances, encourage le dialogue politique et renforce les capacités des institutions et communautés impliquées dans le développement agricole et rural. »

Voir le site CTA.

Article déjà publié en 2016.

                 

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