UNE HISTOIRE CENTENAIRE

Depuis le XVIème siècle

Loin des effets de mode, la mention de vin naturel existe depuis près de 5 siècles comme produit issu de la nature. C’est à partir des XVIII et XIXèmes que cette dénomination s’affirme en tant qu’opposition aux pratiques frauduleuses (coupage avec de l’eau, vins trafiqués ou issus de raisons secs, ajouts de sucre). Elle se traduit en ce sens légalement dès 1897. En 1905, lors de la révolte des vignerons, le slogan « triomphe du vin naturel » est brandi sur les affiches, les barricades, scandé lors des manifestations.

Puis, face à la montée qualitative, à la formalisation des origines (AOC, AOVDQS, vin de pays puis IGP), la notion tombe dans l’oubli. Il est assez intéressant de la voir aujourd’hui resurgir comme une nouveauté : elle vise en effet à s’extraire du cadre jugé standardisant des AOC, vise des « pratiques singulières relevant des attentes sociétales, du marketing et des pratiques de production ».

Quelle signification ?

Le vin naturel ne suit aucun cadre réglementaire même si une association établit un cahier des charges, issu « de raisins bio ou biodynamie, d’une vinification et d’une mise sans intrant ni additif », avec un plafond de souffre (SO2). Il se veut « reflet de son sol avec un minimum de produits chimiques ».

Mais beaucoup de désaccords subsistent entre démarche individuelle (individualiste ?), revalorisation des pratiques viticoles, dissidence (« revenir au véritable goût du raisin »Gerbelle) voir idéologie radicale très « anti » (-libérale, -capitaliste, -grande distribution), pirate, rebelle, voir « terroiriste ».

Des valeurs ressortent liées à une dualité originalité vs typicité, à une remise en avant du terroir en tant que lieu qui induit le travail du vigneron, son mode de vie et son discours. Elles marquent une volonté de rupture face aux dégustations des cahiers des charges des AOC.

Une communication disruptive ?

Exit les noms de château ou de domaine, la créativité linguiste explose les codes traditionnels (jeux de mots, références cinématographiques, …), le graphisme se décale et s’auto centre, le vocabulaire de dégustation se veut moderne voir familier mettant en avant des propriétés organoleptiques singulières : la robe devient transparence, translucidité (les vins étant ni collés ni filtrés), éclat pâle, les arômes se font fruits, épices ou minéralité (marine, végétale, empyreumatiques, beurrée), la bouche est dense, pleine de matière, texturée, croquante et pulpeuse.

Vocabulaire, image, packaging, marketing sont donc originaux, sans sérieux, très éloignés du « territoire de marque » du vin.

Le consommateur toujours absent

Quand bien même ! Cette communication reste éloignée du consommateur, grand oublié des discours : lui qui attend une origine, une explication centrée sur le moment, ne voit-il pas un mot (« naturel ») en remplacer un autre (l’AOC) ; un producteur satisfait se regarder le nombril voir basculer vers le « fake » (attention aux affirmations péremptoires, invérifiables, aux contrevérités) ?

Elle semble même contre-productive : le peu d’informations remontant de la perception des vins naturels montrent une méfiance et de l’incompréhension.

Un potentiel magnifique

Ultime paradoxe, le vin naturel comme les « sans » ou la biodynamie, offrent des perspectives et une réalité à l’opposé de ce marketing de l’opportunisme : retrouver le savoir faire ancestral lié à la connaissance de la terre et du vivant, allié aux connaissances, technologies et outils modernes. Faire face positivement aux excès de la chimie, de la prédation financière ; donner du sens loin de la caricature nostalgique ou néo moderniste d’un paradis perdu lié à la jeunesse, à hier. Ancrer un projet de vie familial au cœur du pays. Être à l’écoute de la société, du consommateur, de ses questionnements voir de ses angoisses.

Et élargir les pratiques : agro écologiques et biologiques (mesure du vivant dans le sol, couvert végétal, matières organiques indispensables), polyculturelles, environnementales (impact carbone), commerciales, sociales et sociétales, etc.

La tendance est portée par des vignerons honnêtes. A chacun d’entre nous de choisir en achetant.

Références : séminaire Vins & consommateurs Inno’vin « la naturalité en question », jeudi 12 septembre 2019 ; Audrey Moutat : Maître de conférences, sémiologue CeReS université de Limoges – Frédéric Brochet : docteur en œnologie, vigneron – Alain Canet – agronome & agroforestier,  Arbre & paysage32 

                 

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