"ON FAIT TOUT POUR QUE RIEN NE CHANGE".
Vision et stratégie, une réussite qui prend son temps.
En clôture des Ateliers du vin de Rayon Boissons (lire ), le célèbre vigneron languedocien est venu donner sa vision du marché du vin (et sa leçon) !
Une master class donnée sur un ton posé qui a posé les bases d’une réussite partie d’abord d’une intuition : le vin doit (re)partir de l’expérience consommateur.
Pour être compris, innover, créer, il faut d’abord qu’il y ait du sens : une origine, un marketing simple ancré dans le territoire de cette appellation, une qualité, une promesse. Pour cela, en tant que producteur, rien ne doit changer mais en tant commercialisateur, tout doit être fait pour que tout change.
Ainsi, le vigneron protège son environnement, la vie des ses sols tout en maintenant rendements et excellence : une seule voie, le bio qui deviendra (qu’on le veuille ou non), la norme y compris à grande échelle et qu’il faudra même dépasser. Et cela marche : Gérard Bertrand développe 985 ha en biodynamie ; 60% de ses vins sont en bio (90% dans 5 ans). Il préserve et régénère ainsi un écosystème qui permet la résilience face aux dérèglements du climat, garde la ressource en eau et donne de meilleurs vins !
Et puis, comme un paysan, il faut prendre son temps…
Tendances, attractivité, commerce.
Installer son identité, sa marque demande 3 ans minimum : le crédo du metteur en marché permute avec celui du producteur.
Puisqu’il faut repartir du consommateur, allons se faire connaître dans les lieux qu’il fréquente, là où il achète. Investissons cette fonction de vente (25 commerciaux en France, 90 dans le monde pour le groupe Gérard Bertrand), soyons audacieux.
Non pour changer puisque tout vient de son origine, de son terroir mais pour donner envie, suivre les évolutions et adapter discours et marketing :
-puisque les consommateurs mettent les BIB de rouge au réfrigérateur, qu’ils plébiscitent les rosés, offrons-leur un rouge léger à macération courte qui désoiffe (en IGP Pays d’OC bio) ;
-les vins surfent sur la tendance nature qui (comme pour d’autres alcools) « trouble » la boisson, lançons « Trouble xp » une gamme aux 3 couleurs non filtrée (donc hors indication d’origine mais toujours bio !) ;
-comme innovation rime avec (re)création, n’oublions pas la 4ème couleur du vin, orange, une catégorie à inventer, idéale pour les fromages mais aussi les cocktails !
-et pour finaliser, marquer les esprits, anticiper, embauchons Emma (la fille de Gérard) comme DA (directrice artistique ; à elle de repérer et de concrétiser les goûts à venir, les usages.
Loin des modes éphémères, le succès commercial prouve la pertinence de cette stratégie : ainsi « côte des roses », né d’un flacon de créatrice designeuse, a-t-il attrapé le mouvement des rosés de Provence pour qui le conditionnement crée le vin, et a pu ainsi devenir n°1 aux États Unis.
Développer demain.
Le Languedoc est sa force, sa palette, les 75 cépages qui le composent, la curiosité, son moteur.
Avec un investissement élargi au multicanal, à l’international et au digital, Gérard Bertrand croit aux vins prémium, seuls capables de rentabiliser le travail du vignerons et de satisfaire l’attente culturelle des consommateurs du monde entier.
Un discours positif, très volontaire dans une ambiance contextuelle souvent morose et court-termiste qui acte son intérêt majeur dans les résultats obtenus : des 25 ha du domaine familial, Gérard Bertrand a fait en 35 ans, une entreprise de 17 propriétés (près de 1 000 ha donc), aux 450 salariés et 180 millions d’€ de CA, à l’implantation internationale (60%).
